Anne Philippe | – Films issus de résidences
– Films issus de résidences

Passages, entre démolition et reconstruction

Création issue d’un travail de résidence de quatre ans à Saint-Denis (93), cité Double-Couronne. Assistante : Aline Fischer.

CRÉATION : déployée dans six endroits différents, investissant les lieux de passages et invitant le public à se déplacer de l’un à l’autre. Création déambulatoire en 6 mouvements : vidéo-fenêtres projetées sur les fenêtres murées des appartements avant démolition, Oublie-moi : installation vidéo-danse dans le hall de l’immeuble, Des arbres : promenade dansée et sonore dans l’allée d’arbre entre les eux bâtiment, Agora : concerts au centre du jardin, associant musiciens habitants et musiciens professionnels, Entre mémoire et oubli : passage d’un funambule entre bâtiment neuf et ancien, Aux fenêtres : concert-danse aux balcons des nouveaux logements. Co-production Estann/Laterna Magica, Ville de St Denis.

FILMS DE CHANTIER : La faute à l’immeuble, Démolir va-t-il de soi, durée 26mn 30, Vert Galant c’était, Vert Galant ça restera, durée : 26mn ; Eliane a vu la ville d’Ys, durée : 10mn ; Oublie-moi, durée 7mn05. Kenzi et Kenza, durée : 41mn 30, Production : Estann.

FILM Dans le Silence et dans le Bruit : durée 45mn, DVD des vidéo-fenêtres, Production : Estann.

WORKSHOP avec les étudiants de l’école d’Architecture de Paris-La-Villette.   

Vidéo-fenêtres

Photogrammes extraits des vidéo-fenêtres elles-mêmes extraites du film Dans le silence et dans le bruit, réalisation Anne Philippe, 2013. ©Anne Philippe

 Série de douze vidéo-fenêtres réalisées et projetées dans les appartements murés, dans le cadre de la création Passages « Entre démolition et reconstruction ». Création issue d’un travail de résidence de trois ans à Saint-Denis (93), cité Double-Couronne.

Les vidéo-fenêtres sont une extension de la carte postale, le rectangle de carton devenant la fenêtre de l’appartement ou l’écran de cinéma, le texte écrit laissant place à la parole mise en scène mais improvisée et adressée par les habitants. Les vidéo-fenêtres requestionnent ainsi la frontière entre espace privé et espace public par une mise en scène des lieux de l’intime par les habitants eux-mêmes. La correspondance est basée sur le trajet d’une lettre ou d’une carte qui va d’une adresse à une autre. La configuration spatiale des lieux mettait en vis-à-vis deux bâtiments dans lesquels les habitants étaient amenés à changer d’adresse et à passer de l’un à l’autre. Les vidéo-fenêtres ont pris corps dans l’un et l’autre des bâtiments, opérant la traversée symbolique et physique des habitants d’un lieu à un autre. La fenêtre fait s’interpénétrer un dedans et un dehors, activée par le corps et la parole. Celle-ci s’improvise librement dans cet espace propice à une parole personnelle mais en même temps adressée, qui se projette à la fois vers l’extérieur et l’intérieur, jusqu’à mettre à jour et intégrer le dispositif de tournage lui-même. 

Dans le silence et dans le bruit

2013. Réalisation : Anne Philippe. Production & distribution : Estann. 44 mn.

Vidéos de chantier

Tournées in situ pendant la résidence :

Oublie-moi

Vidéo-danse spatialisée dans un lieu de passage au moment de la création Passages.
2005. Réalisation : Anne Philippe. Production & distribution : Estann. 7 min 05 sec.

Vert-Galant, ça restera

Making off de la fabrication d’une vidéo-fenêtre avec Madou Black et Dany Boss : fabrication d’une chanson avec les enfants de la cité.
2008. Réalisation : Anne Philippe. Production & distribution : Estann. 25 min 58 sec.

Éliane a vu la ville d’Ys

Films réalisé à partir des dessins des enfants de la cité sur l’imaginaire de la maison au moment de la démolition.
2008. Réalisation : Anne Philippe. Production & distribution : Estann. 7 min 55 sec.

Kenza et Kenzi

Document de la rencontre d’Anne Philippe avec les gitans, vivant à côté de la cité Double-Couronne.
2008. Réalisation : Anne Philippe. Production & distribution : Estann. 41 min 30 sec.

C’est la faute à l’immeuble

Document autour de la perception de la démolition par différents acteurs.
2008. Réalisation : Anne Philippe. Production & distribution : Estann. 27 min 20 sec.

Projet Dérives en Rives

Durée du projet : 5 ans. 2001-2005. Résidence de trois ans dans la ville de Poitiers.

Groupe Dérives en Rives : Anne Philippe, Marcus, Bené, Neness, Mickey, Def.
Formes produites : 12 montages photographiques urbaines sur bâche (3 mètres 20 x 2 mètres 40), performance vidéo-danse, 60’, exposition photographique, (Maison de l’architecture de Poitiers,) rencontres cinématographiques (Carré bleu, Poitiers). édition d’une série de 12 cartes postales. Visites guidées en bus. Film-essais : À côté(s), Musique Malcolm Bothwell,

Co-Production Estann/Laterna Magica, Durée 45mn    

Affiches urbaines

Création de douze affiches originales 3,20 m x 2,40 m sur les panneaux Decaux de la Ville de Poitiers.

Ces affiches ont été réalisées avec le groupe Dérives en Rives, personnes sans chez-soi de la Ville de Poitiers. L’inversion du point de vue sur la ville (l’envers des panneaux publicitaires) a donné lieu à l’élaboration de montages photographiques procédant d’une mise en abyme du site : le lieu dans lequel est placé le panneau publicitaire fut photographié en plan large, l’espace du panneau dans l’image photographiée accueillant par collage une image en gros plan, image d’un détail prélevé sur le site et renvoyant à une autre temporalité. L’envers de ces panneaux est un espace d’image alloué à la Ville. Lieux d’une moins grande visibilité commerciale, ils ouvrent un espace de « décrochage » propice aux turbulences, en extrados. C’est dans ce petit écart entre l’image du lieu dans le lieu et le lieu dans l’image que s’ouvre un espace de vacance du regard où peut se prendre en considération ce qui est à côté(s) de soi.

2005. En collaboration avec le groupe Dérives en rives. Exposition photographique urbaine. Production : Estann. Diffusion : Maison de l’architecture de Poitiers, panneaux Decaux de la Ville de Poitiers.

Film À côté(s)

Vidéo issue du projet Dérives en Rives. Durée du projet : 2002-2005, résidence de trois ans dans la ville de Poitiers. Groupe Dérives en Rives : Anne Philippe, Marcus, Béné, Neness, Mickey, Def. Formes produites : 12 montages photographiques urbaines sur bâche (3,20 m x 2,40 m), performance vidéo-danse, 60 min, exposition photographique (Maison de l’architecture de Poitiers), rencontres cinématographiques (Carré bleu, Poitiers). Édition d’une série de 12 cartes postales. Visites guidées en bus. Film-essai : À côté(s), musique Malcolm Bothwell, co-production : Estann /Laterna Magica, 45 min.

2005. Réalisation : Anne Philippe. Production : Estann. Distribution : ADAV. 45 min 49 sec.

Le projet « Dérives en Rives » aborde le paysage urbain à partir des questionnements liés à l’hospitalité et l’image dans l’espace public avec des personnes vivant en situation de grande précarité dans la ville de Poitiers. Ces questionnements se sont précisés suite aux échanges avec des éducateurs de rue et des rencontres hebdomadaires avec un groupe de cinq personnes usagers du relais Georges-Charbonnier à Poitiers, lieu-relais pour les personnes sans chez soi. Cette rencontre de plusieurs subjectivités s’est orientée progressivement autour d’un souci commun, celui de transformer le regard sur les personnes vivant dans la rue. Un long travail de résidence a alors débuté et a pris la forme première de la création d’un lieu commun, une « cabane-barque », un lieu tout à la fois de rencontres, de repli, de travail et de production vidéo et photographique autonome des structures culturelles et sociales de la Ville, partagé avec le groupe retenu pour la réalisation du projet. Ce lieu, nommé Studio Dérives en Rives, n’était ni public ni privé, mais organique, niché dans la ville et rythmé par la temporalité de nos rencontres[2]. Le nom de ce lieu, Dérives en Rives, est devenu un nom commun désignant également nos productions. Au fil du temps, un projet a pris corps, celui de polliniser discrètement l’espace public à partir de l’expérience de la rencontre médiée par des expérimentations d’arpentage de l’espace de la ville et de l’image.

Le regard dans la ville est perpétuellement instrumentalisé, orchestré par l’éviction de la rencontre non contrôlée de l’autre. Le regard est happé par des images conditionnant les trajets du quotidien dans la ville, images et trajets produits par une surconsommation de la ville qu’entretiennent les images des panneaux publicitaires. En contrepoint, au travers de la pratique quotidienne des lieux, la ville vécue par les participants au projet apparut au début comme un territoire marqué par des lieux-repères. Les réseaux institutionnels tels que les Restaurants du cœur ou les foyers, les lieux propices à faire la manche, les lieux de rencontre nocturnes trament le quotidien monotone des participants du projet, les enfermant dans une routine. La répétition quotidienne des mêmes trajets obéit à une géographie de la survie quasi institutionnalisée, aliénante, ne permettant pas une sortie de soi pour aller à la rencontre de l’autre. Comment alors faire sourciller le regard sur les lieux dits ordinaires, ceux que l’on finit par ne plus voir, détourner ces réseaux pour ne plus les subir, retisser une intimité territoriale plurielle mais susceptible d’être partagée, et retrouver ainsi une présence dans l’espace public ? « Les perceptions de l’écart et de la différence, fugaces et intermittentes, sont en jeu dans l’économie du désir, parce qu’elles ouvrent le regard sur des dimensions diverses, réglées par des espaces et des temps différents : c’est ce qui lie la discontinuité́ au tressaillement, au frémissement[3]. »

 

[2]                Les arrivées en train de Paris à Poitiers, qui marquaient le début de chaque atelier de travail, ont provoqué chez les participants un sentiment nouveau, peu éprouvé auparavant et à chaque fois réitéré, celui de se savoir attendu. Ces ritournelles des arrivées et des départs rythmant le projet deviendront un élément structurant de nos rencontres.

[3]                Da Costa Antonio, Palomar, intermédialité et archéologie de la vision, Cinéma et intermédialité, vol. 10, n°2-3, 2000. Disponible sur : https://doi.org/10.7202/024821ar , consulté le 02.01.2018

 

Le « milieu » des sans chez soi est communément singularisé par un rapport au temps et à l’espace marqué par la survie et l’absence d’un « chez soi », lieu d’une intimité privée séparée de l’espace public. L’espace public ainsi ponctuellement « privatisé » est sujet à friction avec les habitants ayant un chez soi séparé de l’espace public, rendant problématique la rencontre de l’autre. Mais il se singularise également par un autre rapport au temps qui n’est pas occupé par un travail fixe, sans que nous puissions pour autant l’assigner à de l’inactivité. Cette opinion communément négative de l’inactivité comme le contraire de l’activité liée au travail rémunéré fut renversée dans le cadre du projet pour devenir une véritable force : celle d’un temps retrouvé, précieux et propice à la production d’actes poétiques pourvoyeurs de sens, ouvrant sur un imaginaire d’une communauté de regards.